Lettre au ministre de l'Immigration Marco Mendicino
Christine Normandin, députée de Saint-Jean et porte-parole du Bloc Québécois en matière d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté.
L’honorable Marco E. L. Mendicino, C.P., député
Ministre de l'Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté
365, avenue Laurier Ouest
Ottawa (Ontario) K1A 1L1
Objet : Situation des détenteurs de confirmation de résidence permanente
Monsieur le Ministre,
La présente est pour vous faire part de nos inquiétudes quant à la situation des gens qui ont reçu leur confirmation de résidence permanente (CDPR) après le 18 mars 2020. Ma collègue, la députée d’Avignon-la-Mitis-Matane-Matapédia, avait déjà fait connaître nos questionnements au ministre de la sécurité publique dans une lettre lui étant adressée le 14 septembre 2020, laquelle est demeurée sans réponse. Nos craintes quant à situation des demandeurs qui ne sont pas exemptés des restrictions de voyage sont toujours valides, mais elles s’ajoutent maintenant à celles concernant la gestion future des dossiers des détenteurs de CDRP.
Situation difficile pour les futurs résidents permanents
Nous avons à de nombreuses reprises été interpellés par des gens qui sont détenteurs de CDRP et qui sont visés par les restrictions de voyage. Puisque les futurs résidents permanents passant par le processus de parrainage et de réunification familiale sont exemptés de ces restrictions, ceux qui ne peuvent toujours pas venir s’établir ici sont principalement des travailleurs qualifiés et des immigrants investisseurs. Ce sont des gens qui, en prévision de leur installation au Canada, ont souvent coupé les liens avec leur pays d’origine : ils ont vendu leur maison et leur entreprise, ils ont quitté leur emploi, ils ont désinscrit leurs enfants de l’école. Les économies mises de côté pour leur réinstallation fondent dans certains cas à vue d’œil, les futurs résidents ayant parfois eu à louer un appartement ou à prendre une chambre d’hôtel dans leur pays d’origine en attendant de savoir quand ils pourront finalement venir s’installer. Plusieurs redoutent l’arrivée de l’expiration de leur CDRP et par voie de conséquence, la possible obligation de devoir recommencer une partie du processus, avec les frais d’examens médicaux et de vérification d’antécédents judiciaires que ça implique et qui peuvent être élevés, surtout pour une famille.
Situation intenable à prévoir pour le ministère
Nous nous questionnons également pour la suite des choses advenant que les frontières ne soient pas rouvertes avant un certain temps. À moins de commencer sous peu à lever les restrictions pour les détenteurs de CDRP, nous comprenons qu’avec les seuils d’admission qui existent, il sera ardu de reprendre d’un coup le temps perdu lorsque les frontières ouvriront finalement, entrainant d’autant des retards dans l’admission des dossiers qui sont toujours en attente. Nous craignons également que cette situation n’entraîne une charge supplémentaire pour les agents d’immigration si, dans l’attente de la levée des restrictions, les demandeurs doivent refaire des examens médicaux et des vérifications d’antécédents judiciaires que les agents devront alors réévaluer. Si les détenteurs de CDRP étaient plutôt autorisés à venir enfin s’installer ici, plusieurs dossiers pourraient être finalisés rapidement dès maintenant.
Solutions suggérées
Que l’ensemble des détenteurs de CDRP pour qui celle-ci a été délivrée après le 18 mars 2020 soient exemptés des restrictions de voyage au Canada.
Nous vous soumettons, monsieur le ministre, que des discussions devraient être entamées avec votre homologue, le ministre de la Sécurité publique, en vue de lever sans délai les restrictions de voyage visant actuellement les détenteurs de CDRP l’ayant reçue après le 18 mars 2020. Nous ne comprenons d’ailleurs pas pour quelle raison ces demandeurs sont visés par des restrictions, alors que les étudiants internationaux et les détenteurs de CDRP en provenance des États-Unis ne le sont pas. Il ne semble exister à cet effet aucune justification sanitaire, d’autant que les détenteurs de CDRP manifestent depuis longtemps leur intention de se plier à toutes les mesures de quarantaine mises en place à leur arrivée. Nous vous soumettons par ailleurs que leur situation ne devrait pas être considérée comme un voyage, mais bien comme un déménagement : leur intention de s’installer ici à long terme, contrairement à beaucoup d’autres déplacements qui ne sont pourtant pas interdits, devrait peser dans la balance. Qui plus est, les détenteurs de CDRP pour qui nous demandons une levée des restrictions sont principalement des travailleurs qualifiés et des immigrants investisseurs qui seront appelés à participer à la relance économique par leur apport en main-d’œuvre, par la création d’emploi dans le cas des immigrants investisseurs et par les dépenses qui seront faites pour leur installation au pays.
Qu’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada prolonge la durée de validité de toutes les Confirmations de résidence permanente de 12 mois à partir de la date de leur échéance.
Advenant la levée des restrictions de voyage, certains demandeurs pourraient se sentir pressés de venir au Canada immédiatement alors que la date d'expiration de leur confirmation de résidence approche. Ne voulant pas s’exposer aux risques associés au voyagement en temps de pandémie, il est de leur droit d’attendre que la situation sanitaire mondiale se stabilise avant de venir au Canada. Nous soumettons qu’une directive unique visant à prolonger la validité des CDRP permettra de mettre fin à cette incertitude tout en évitant d’ajouter à la tâche des agents d’immigration dans le futur. Nous croyons que cette prolongation devrait pouvoir se faire sans qu’il soit nécessaire de refaire les examens médicaux ou les vérifications d’antécédents judiciaires s’ils venaient à échéance dans l’intervalle. D’une part, il est vraisemblable que la situation des demandeurs ne changera pas quant à leur situation de santé ou leurs antécédents entre la date d’expiration initiale de leur CDRP et la date de leur arrivée ici ensuite. D’autre part, il serait pour le moins questionnable que des suites de l’écoulement du temps dans un contexte de crise sanitaire qui est hors de leur contrôle, on refuse finalement à des détenteurs de CDRP une résidence permanente qui leur était autrement à peu de chose près acquise au moment d’initialement émettre la CDRP.
Finalement, nous nous permettons de soulever l’incongruité de certaines décisions du gouvernement: alors que dans les faits, les détenteurs de CDRP ne voyagent pas autant qu’ils déménagent et souhaitent le faire en tout respect des règles sanitaires, le gouvernement s’obstine à ne pas interdire les voyages non essentiels. Nous vous soumettons que cette situation envoie un mauvais message aux immigrants.
Je me permets d’espérer, monsieur le ministre, que la présente saura trouver chez vous une oreille attentive et vous prie d’agréer mes salutations les meilleures.
Pour rester informer du travail de Christine Normandin pour le dossier d’immigration : https://christinenormandin.quebec/infolettre-immigration